Pour lutter contre le système prostitutionnel et dénoncer l’activité illégale de faux salons de massage, l’association ZéroMacho offrait de « vrais massages » aux passants samedi 17 juin à Paris. Reportage.
« Ici, on masse gratis et sans finitions », « Dans un monde d’égalité, il n’y aura pas de prostitution » ou encore « Féministes contre le système prostituteur »… voici ce que l’on pouvait lire ce samedi 17 juin, place de Levis dans le 17ème arrondissement de Paris. À l’origine de ces messages, l’association ZéroMacho. Engagé contre le système prostitutionnel depuis une dizaine d’année, ce collectif, composé uniquement d’hommes, a mis en place une opération « massage » afin de dénoncer la véritable activité de prétendus salons de massages, qui sont en réalité des lieux de prostitution. Tantôt intrigués, tantôt réticents, mais dans l’ensemble volontaires, les passants se sont prêtés au jeu et ont pu se faire offrir un massage gratuit, dans la rue, par des masseurs et masseuses professionnel.les de la Fédération Française des Massages Bien-Être, qui pâtissent, eux aussi, de l’amalgame entre leur profession et prostitution. Le slogan de ZéroMacho : « Pour la fête des Pères, offrez un vrai massage ! »
Le but de cette action ? Sensibiliser, faire réagir et prendre conscience de l’activité illégale de ces salons. Il faut dire qu’ils ne relèvent pas de l’exception. ZéroMacho a fait le compte : ils sont 341 à Paris, dont 50 dans le 17ème arrondissement… Cette explosion de salons dans le quartier préoccupe le maire Geoffroy Boulard, présent samedi aux côtés de l’association.



L’activité de ces salons a pignon sur rue et fait même sa publicité avec des flyers dans la rue et sur internet. D’ailleurs, ils se ressemblent tous : panneau à néon, petite sonnette en plastique blanche, affiches, le chat qui agite la patte en vitrine… Alors même que la loi Olivier-Coutelle pénalise les clients depuis 2016, comment expliquer cette prolifération et, surtout, l’indifférence générale pour le sort de ces femmes, pour la plupart sans papier, réduites en esclavage sexuel ? « On s’est décarcassés pour faire voter cette loi, puis elle est passée et rien. Tout reste à faire…, déplore Fred Robert, membre de Zéro Macho. Ce qui est fascinant, c’est que tout le monde sait ce qui s’y passe. Aucun adulte n’a de doute. Mais tant que cela ne trouble pas l’ordre public… lance-t-il avant de s’indigner : et parce que ce sont des asiatiques c’est toléré ? C’est une forme de racisme hallucinante, complètement assumée ! »
Les membres de ZéroMacho sont allés à la rencontre des femmes qui travaillent à l’intérieur de ces salons. « Ce sont toujours des femmes en nuisette et à chaque fois elles font les “finitions“ [ndlr. autrement dit un acte sexuel rémunéré]. Entre ces salons, aucune différence sur l’aspect, les tarifs ni sur l’origine des femmes en question, qui viennent principalement de communautés minoritaires du Nord-Est de la Chine. Elles ne parlent pas un mot de français alors que certaines sont là depuis des années. Ce qui en dit long sur l’isolement dans lequel elles vivent. On se doute qu’elles n’ont pas beaucoup de recours pour échapper à leur sort. C’est un fil rouge de domination » rapporte Fred Robert.
Alors que la loi de 2016 n’a été appliquée que dans très peu de cas, ZéroMacho espère que cette “opération massage“ dans l’espace public provoquera une prise de conscience populaire. Le collectif avait, déjà il y a quelques mois, tagué « C’est combien ? 1500€ d’amende ! » devant 49 salons du 17ème arrondissement. Pour l’association, les responsables sont tout trouvés : les clients. « La prostitution est un problème d’hommes, c’est une affaire de domination masculine » explique Florence Montreynaud, marraine de ZéroMacho. « Nous n’agissons pas contre les personnes prostituées. On est pas “putophobe“. On est contre le système prostitueur, précise Fred Robert. Pour nous, la prostitution est la clé de voute du patriarcat ».
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