
Zainab Bangura, représentante spéciale de l’ONU sur les violences sexuelles en situation de conflit. UN Photo/Mark Garten
Un nouveau rapport de l’ONU sur les violences sexuelles comme tactique de guerre souligne que la stigmatisation des survivantes est au cœur de la stratégie des agresseurs. Il faut remettre en cause les « normes sociales sous-jacentes ».
« La honte et la stigmatisation font partie intégrante de la logique du recours à la violence sexuelle en tant que tactique de guerre ou de terrorisme », dénonce le dernier rapport annuel de l’ONU sur les violences dans les conflits armés. Le document appelle à reconnaître les victimes de violences sexuelles liées aux conflits comme des victimes légitimes de conflits et de terrorisme.
Ce rapport annuel, qui doit être présenté au Conseil de sécurité le 15 mai, examine les violences sexuelles liées aux conflits commises au cours de l’année 2016 dans 19 pays pour lesquels l’ONU dispose d’informations fiables1.
Le document déplore que « les violences sexuelles continuent d’être employées comme une tactique de guerre » et évoque des « viols de masse et stratégiques ». Il établit une liste de 46 parties qui se seraient systématiquement livrées à des viols et à d’autres formes de violence sexuelle dans des situations de conflit armé. Il s’agit principalement d’acteurs non-étatiques – groupes rebelles ou terroristes, comme Daech – mais parfois des forces armées étatiques, en RDC au Soudan et Soudan du Sud, et en Syrie.
« Il faut que les personnes ayant subi des violences sexuelles obtiennent justice et que cela se sache »
Les auteur.e.s du rapport font part d’une « préoccupation » particulière au sujet de la stigmatisation que subissent les survivantes. Une stigmatisation qui est d’ailleurs au cœur de la stratégie des agresseurs. Ils « savent que ce type d’actes peut transformer les victimes en parias, et ainsi briser les liens familiaux et communautaires », souligne le rapport. En insistant donc : il est « nécessaire de remettre en cause les normes sociales sous-jacentes » qui peuvent conduire à « normaliser » les violences faites aux femmes « et perpétuent la pratique consistant à culpabiliser les victimes ».
Et de poursuivre : « Il est donc nécessaire que les agents de l’État et les chefs coutumiers établissent clairement, par leurs prises de position publiques et leur comportement, que toute violence sexuelle est strictement interdite, que l’auteur de l’acte est le seul à porter la culpabilité et que personne d’autre ne saurait être stigmatisé comme coupable ».
Les auteur.e.s du rapport se disent, en outre, particulièrement préoccupé.e.s par le sort des enfants nés d’un viol « qui peuvent eux aussi être marginalisés pendant toute leur vie en raison de la stigmatisation qu’ils subissent et de l’incertitude liée à leur statut juridique ».
« Pour que la consolidation de la paix et la réconciliation se concrétisent, il faut que les personnes ayant subi des violences sexuelles obtiennent justice et que cela se sache », insiste le rapport.
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1/ Il s’agit de13 pays en situation de conflit (Afghanistan, République centrafricaine, Colombie, République démocratique du Congo, Irak, Libye, Mali, Myanmar, Somalie, Soudan du Sud, Soudan, Syrie et Yémen), de 4 pays dans des situations post-conflictuelles (Bosnie-Herzégovine, Côte d’Ivoire, Népal et Sri Lanka) et 2 autres pays ou la situation demeure « préoccupante » (Burundi et Nigéria).