Le prix Nobel de la paix 2023 a été attribué à la militante iranienne Narges Mohammadi, actuellement emprisonnée dans la prison d’Evin à Téhéran. Cette nomination vise à soutenir la révolte actuelle en Iran.
Vendredi 6 octobre, à Oslo en Norvège, le prix Nobel de la Paix 2023 a été décerné à Narges Mohammadi. Elle est la 19ème femme à recevoir cette distinction. Le Nobel de la paix étant le Prix Nobel qui compte le plus de femmes lauréates, même si elles restent très minoritaires… Actuellement emprisonnée par la République islamique, la militante a été distinguée pour son action pour les femmes.
Qui est Narges Mohammadi et quels sont ses engagements ?
Cette Iranienne de 51 ans est la vice-présidente de l’association Defenders of Human Rights Centre, dirigée par l’avocate Shirin Ebadi, elle aussi prix Nobel de la paix, en 2003. Le comité Nobel norvégien a ainsi souhaité rendre hommage au combat de Narges Mohammadi contre l’oppression des femmes en Iran et sa lutte pour la défense des droits humains et de la liberté pour tous.
La présidente du comité, Berit Reiss-Andersen, a insisté sur le « coût personnel énorme » de l’engagement de la militante. « Au total, le régime l’a arrêtée 13 fois, l’a condamnée cinq fois, à un total de 31 ans de prison » rappelle t-elle. En mai 2016, sa condamnation s’élevait à seize ans de prison, elle a depuis été prolongée… Considérée comme une « détenue d’opinion » par Amnesty International, Narges Mohammadi a déclaré à l’Agence France-Presse n’avoir « presque aucune perspective de liberté ». En outre, elle est séparée de sa famille, qu’elle n’a pas vue depuis plusieurs années. Son mari et ses deux enfants s’étant réfugiés à Paris.
Un prix Nobel dédié à toutes les Iraniennes
En décernant ce prix Nobel de la paix à Narges Mohammadi, le comité affiche un soutien infaillible et clair au mouvement de contestation « Femme, vie, liberté » en Iran. Débutée le 16 septembre 2022, à la suite de la mort tragique de Mahsa Amini, tuée par la police des mœurs pour n’avoir pas « bien » porté son voile, la révolte contre le régime en place ne faiblit pas. Le 16 septembre 2023, date anniversaire, Narges Mohammadi et plusieurs de ses co-détenues ont brûlé leur voile dans la cour de la prison d’Evin à Téhéran. « [Les Iraniennes] font l’objet de mesures juridiques, sociales et économiques de plus en plus strictes, alarme Berit Reiss-Andersen lors de son discours, avant d’ajouter : Nous dédions ce prix à l’ensemble des Iraniens et en particulier aux femmes et aux filles iraniennes qui ont inspiré le monde entier par leur courage et leur combat pour la liberté et l’égalité ». Un message fort est ainsi envoyé à l’Iran, classé 143e sur 146 du classement du Forum économique mondial sur l’égalité des sexes.
Les réactions
Ce prix Nobel de la paix 2023 a suscité de nombreuses réactions à l’international. Réactions bien sûr négatives en Iran : « Nous constatons que le comité Nobel a attribué le prix de la Paix à une personne qui a été reconnue coupable de violations répétées des lois et qui a commis des actes criminels. Nous condamnons une action partiale et politique », a déclaré Nasser Kanaani, porte-parole cité dans un communiqué du ministère des affaires étrangères iranien.
Du côté des instances internationales, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, a salué ce choix et cet « hommage à toutes ces femmes qui se battent pour leurs droits au péril de leur liberté, de leur santé et même de leur vie ». L’organisation a exigé la libération de Narges Mohammadi, ainsi que « celle de tous les défenseurs des droits humains emprisonnés en Iran ». D’autres soutiens se sont manifestés : Oleksandra Matviichuk, ancienne prix Nobel de la paix et directrice du Centre ukrainien pour les libertés civiles, s’est également réjouie de cette victoire : « Nous vivons dans un monde très interconnecté. En ce moment même, les Iraniens se battent pour la liberté. Notre avenir dépend de leur succès », a-t-elle écrit sur son compte X. Svetlana Tikhanovskaïa, leader de l’opposition bielorusse en exil en Lituanie, s’est elle aussi exprimée : « La militante des droits de l’homme emprisonnée est une source d’inspiration pour tous, car elle a refusé d’être réduite au silence, même derrière les barreaux. Comme le lauréat de l’année dernière, le Biélorusse Ales Bialiatski, elle doit être libérée ».