Documentaire primé au dernier Festival de Cannes, « Les Filles du Nil » de Nada Riyadh et Ayman El Almir dresse le portrait d’une bande de jeunes femmes qui réveillent un petit village avec leur théâtre de rue. Lumineux.

« Dans un village du sud de l’Égypte, une bande de jeunes filles se rebelle en formant une troupe de théâtre de rue. Rêvant de devenir comédiennes, danseuses et chanteuses, elles défient leurs familles coptes et les habitants de la région avec leurs performances audacieuses. » En lisant ce résumé des « Filles du Nil », on se surprend à penser : « Encore un film féministe…. ». Et pourtant, comme l’amour ou la guerre, le sujet est aussi inépuisable que les points de vue des cinéastes qui s’en emparent.
Pour ce documentaire, il s’agit d’un duo égyptien, Nada Riyadh et Ayman El Amir, dont la sincérité et celle de leurs personnages nous ouvrent une nouvelle fenêtre sur le combat des femmes du Moyen-Orient. Le couple de cinéastes, voyageant dans toute l’Egypte pour une association féministe du Caire, ont rencontré en 2017, à Barsha, petit village du Sud, une bande de jeunes filles coptes pas comme les autres. Majda, Haidi, Monika et leurs amies interprètent dans les rues de leur village des pièces-performances écrites à partir de leurs propres expériences et de leurs rêves.
Leur troupe, Panorama Barsha, interprète, chante et danse le désir de liberté des femmes, leur refus du mariage trop jeune, leurs désirs de pratiques artistiques (Monika veut devenir chanteuse… ou mourir). « Combien de temps devrons-nous attendre ? » dit Majda, leur metteuse en scène et la plus déterminée.
Mais en quatre ans de tournage, les jeunes filles ont été rattrapées par la réalité du patriarcat via leurs familles ou leurs fiancés. « Rentrer dans le rang ou se révolter ? Cette lutte interne est propre à tous, et c’est le sujet du film » résume Ayman El Amir, un des deux cinéastes. A la fin des « Filles du Nil », c’est de leur audace et énergie dont on veut se souvenir, une lutte pour la survie si contagieuse que leurs petites sœurs reprennent le flambeau.
Les filles du Nil de Nada Riyadh et Ayman El Almir, documentaire, 1h42, Egypte, France, Danemark, Qatar, Arabie Saoudite, produit par Dolce Vita, Felluca et Magma, distribué par Dulac. Prix spécial du jury au Festival de Turin. Présenté à la 63e Semaine de la critique en 2024, Les Filles du Nil a remporté L’Oeil d’or, Prix du meilleur film documentaire au dernier festival de Cannes, ex-aequo avec Ernest Cole de Raoul Peck.