Dans leur manifeste, Lou Chesné et Youlie Yamamoto reviennent sur l’aventure des Rosies. Vêtues de leur bleu de travail, elles représentent un symbole de résistance féministe contre le capitalisme et le patriarcat. Leur devise ? « Rosies partout, par tou·tes, pour tou·tes ! »
Youlie Yamamoto et Lou Chesné, portes-parole d’Attac France, ont fondé le mouvement des Rosies en 2019. Si elles n’étaient que quelques femmes lors de la première manifestation, l’engouement suscité par leur présence a vite fait de rassembler un plus grand nombre de femmes. Puis une marée Rosies s’est répandue dans la France entière. Elles s’imposent désormais dans l’espace public pour exprimer leur colère en chantant et dansant, toujours vêtues de leur bleu de travail et de leur bandana rouge à pois blancs sur la tête.
Lire : LES ROSIES DANSENT LEUR COLÈRE
On s’lève, on s’casse, on manifeste !
Dans ce manifeste les co-fondatrices reviennent sur leur expérience et sur la genèse de ce mouvement féministe. Tout a commencé fin 2019 à l’occasion d’un meeting féministe : « A l’origine, nous voulions juste faire une chanson, A cause de Macron, détournant les paroles de la chanson A cause des garçons pour offrir un clip de contestation au pied du sapin du monarque présidentiel […] Puis nous avons ajouté la dimension sociale avec le bleu de travail ». Le clip connaît alors un véritable succès et c’est ainsi que naît l’idée de reprendre le symbole de Rosie la riveteuse pour « comprendre en une image qu’il s’agissait d’une revendication féministe liée au travail ».
Ce symbole a trouvé toute sa place dans la lutte contre la réforme des retraites ou encore en soutien aux premières de corvées qui « ne travaillent pas moins que les hommes. Elles travaillent juste beaucoup plus souvent gratuitement qu’eux ». Mais peu à peu, le mouvement Rosies s’est étendu à toutes les luttes féministes : « L’objectif est de s’emparer des maux du patriarcat en mobilisant nos corps et nos voix ». Et c’est ainsi que les paroles des chansons évoluent et que « les thèmes de la lutte contre le patriarcat et contre les violences sexistes et sexuelles ont infusé nos chansons ».
Les Rosies en bloc contre le patriarcat
« Le féminisme sans lutte des classes, c’est du développement personnel » peut-on lire sur la couverture du manifeste. Cette phrase résume à elle seule l’enjeu politique qui se cache derrière la naissance des Rosies. « L’association du vêtement issu de l’imaginaire ouvrier avec le fichu rouge issu de l’imaginaire féministe incarne ainsi l’indissociabilité du féminisme et de la question sociale. » Tenue bleue, fichu rouge et gants jaunes, en trois couleurs, les Rosies rendent visibles en un coup d’oeil le combat des femmes contre le sexisme et le patriarcat.
Au fil des pages, les deux autrices racontent aussi comment le mouvement des Rosies a essuyé de vives critiques à ses débuts, notamment avec le prétexte que leur mouvement divisait la lutte. Mais comme s’accordent à le dire Youlie Yamamoto et Lou Chesné « le fait que les femmes prennent la place, la rue, les cortèges avec leur vécu et leurs revendications, cela a renforcé, rassemblé, redynamisé les mobilisations ! » Toutes ces femmes contribuent à la diversité des formes de lutte, les rendant ainsi plus fortes et plus visibles. Car « Sans féminisme, la lutte des classes est une impasse ! ».
La danse et le chant sont également souvent reprochés aux Rosies, jugés inutiles et ridicules. Comme si la joie ne pouvait être compatible avec des revendications et dénonciations d’injustices sociales. Mais c’est justement la joie qui rassemble et créé cette fameuse « arme de résistance féministe ». A l’origine de l’idée de la chanson A cause de Macron, Aurélie Trouvé, députée LFI et ancienne porte-parole d’Attac témoigne. Elle raconte que « Des centaines de femmes, qui pour certaines n’osaient plus manifester, se sont mises à danser pour leurs droits et à animer les cortèges partout en France. Dans des manifestations toujours plus réprimées, nous opposons aux violences policières la vigueur de nos chorégraphies ».
Un manifeste de résistance féministe
Riche condensé de la lutte menée par les Rosies depuis 2019, le Manifeste se veut aussi un outil éclairant sur la situation des travailleuses. Chiffres à l’appui, les autrices démontrent les inégalités sociales pénalisant en premier lieu les femmes. L’ouvrage est également ponctué de témoignages de femmes responsables politiques, associatives et syndicales. Toutes témoignent de l’importance de ce mouvement comme Clémentine Autain qui qualifie « l’amour, la fête la chanson » comme des « manières de subvertir la souffrance de chacune pour la métamorphoser en combat collectif ». Pour Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, « Au-delà de la mobilisation contre la réforme des retraites, les Rosies sont restées un symbole et sont de toutes les luttes sociales et féministes ».
Le manifeste des Rosies est un indispensable de la lutte sociale. Il comprend également un kit de mobilisation avec toutes les chansons à reprendre en manifestation. Celles-ci sont accompagnées d’une petite explication situant l’année de création et le contexte dans lequel elles ont été écrites. Véritable outil de résistance féministe pacifiste, voilà un manifeste à mettre entre toutes les mains pour crier haut et fort « RÉ-VO-LU-TION* » !
*Extrait de la chanson “A cause de Macron”.
MANIFESTE DES ROSIES de Lou Chesné et Youlie Yamamoto. Éditions Les Liens qui Libèrent, 154 pages, 12€.
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