Difficile de passer à côté de l’hyper médiatisation du film d’ouverture de ce 76eme festival de Cannes : un biopic à la gloire de la dernière favorite du roi Louis XV et surtout de sa réalisatrice, Maïwenn.
La réalisatrice et comédienne Maïwenn Le Besco a attendu son septième film pour s’attaquer au personnage de Jeanne du Barry : née Jeanne Vaubernier, la favorite des dernières années de Louis XV a en effet longtemps été considérée par l’Histoire comme une fille du peuple élevée au plus haut de la hiérarchie sociale grâce à son pouvoir de séduction.
Maïwenn présente Jeanne comme une femme libre, courageuse et vénale dans un monde où les hommes sont tout puissants. Le comte du Barry monnayait déjà les charmes de Jeanne avant de la présenter à Louis XV pour gagner les faveurs du monarque, Quand ce dernier l’a réclamée comme favorite, Du Barry a épousé Jeanne contre une grosse somme d’argent pour la « céder » avec un titre de duchesse. Cette « fille de rien prête à tout » paiera cher son ascension : elle a été emprisonnée au couvent à la mort de Louis XV et décapitée à la fin de la révolution.
La cinéaste incarne Jeanne dans un film au classicisme léché quelque part entre Cendrillon et la « Marie Antoinette » de Sofia Coppola. On pense aussi à « Aline » de Valérie Lemercier : les deux oeuvres partagent le même chef opérateur, Laurent Dailland, et des budgets hors normes (20 millions d’euros) pour incarner à l’écran des ascensions sociales féminines fulgurantes.
Le cinéma de Maïwenn ne fait pas dans la nuance et c’est ce qui fait son charme : « Police », « Mon roi », « ADN » sont des films de caractère, surfant sur les émotions des protagonistes et des spectateurs. Dans Jeanne du Barry, la spontanéité de Jeanne, sa volonté de ne pas contenir ses émotions dans une cour corsetée, est ce qui la fait aimer de Louis XV. Rappelons que ce roi est incarné par Johnny Depp, condamné pour diffamation après des violences dénoncées par son ex compagne. L’acteur américain a peu de dialogues et ressemble à un vieil homme vide et triste. Le parallèle entre le Versailles du 18ème siècle et le monde du cinéma est facile : or et paillettes, hiérarchie sans pitié et cruauté humaine sont au rendez-vous. (Lire : Polémique sur le film d’ouverture du Festival de Cannes)
« Jeanne du Barry » de Maïwenn Le Besco (France, 1h30) , avec Maïwenn, Johnny Depp, Benjamin Lavernhe. Produit par Why Not, distribué par Le Pacte, en salle le 16 mai 2023. Festival de Cannes, en ouverture hors compétition.