La justice a ordonné le blocage de sites extra-Européens au nom de la protection des enfants. Mais beaucoup échappent encore à tout contrôle.
Ce n’est pas encore la fin de la surexposition des mineurs aux sites pornos ultra-violents mais c’est un premier pas. La Cour d’appel de Paris a ordonné ce jeudi 17 octobre le blocage de plusieurs sites pornographiques extra-européens, qui n’ont pas pris de mesures de contrôle de l’âge des utilisateurs. Ils doivent être bloqués sous 15 jours et leur accès ne sera rétabli que lorsqu’ils auront démontré « la mise en œuvre (par ces derniers) d’un contrôle autre que purement déclaratif de ce que les utilisateurs sont majeurs»,
L’argumentation qui sous-tend cette décision corrobore celle des associations qui avaient saisi la justice : la Cour d’appel a considéré que « l’intérêt supérieur de l’enfant » est une « considération primordiale » qui justifie de porter atteinte à « d’autres droits tels que la liberté d’expression » indique l’arrêt consulté par l’AFP. Ce que disent depuis des années des associations comme « La Voix de l’enfant », « e-Enfance » et nombre d’associations féministes qui réclament le blocage de ces sites.
La sénatrice socialiste Laurence Rossignol co-autrice d’un rapport sénatorial sur l’industrie pornographique estime que « les attendus de la Cour d’appel confirment que ces contenus sont susceptibles de mettre en péril la construction intime des mineurs, et de favoriser une image dégradée de la sexualité et des rapports entre les individus. »
Le blocage de ces quelques sites ne met pourtant pas fin à l’influence écrasante des sites porno et « pornocriminels » sur une sexualité construite autour de la violence .
Ces sites sont en effet solidement armés pour résister à la justice. Depuis la loi du 30 juillet 2020, imposant aux sites pornographiques à mettre en place un contrôle de l’âge de leurs visiteurs, ils ont réussi à se dérober. Et les fournisseurs d’accès à internet, qui doivent bloquer l’accès aux sites pornographiques n’ayant pas mis en place ce contrôle, se montrent hésitants.
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Pour se dérober, certains sites pornos invoquent d’autres législations supranationales. La décision de la Cour d’appel de Paris ce jeudi ne concerne pas plusieurs sites pornographiques établis en Europe, qui sont en attente d’une décision de la Cour de Justice de l’Union européenne. « Des sites majeurs échappent à un blocage qui devrait s’imposer » regrette Frédéric Benoist, avocat des associations de protection de l’enfance auprès de l’AFP.
Les dirigeants de sites pornographiques invoquent aussi des questions techniques pour se dérober, renvoyant la balle au législateur. A tel point que l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), a publié, le 11 octobre dernier, un texte spécifiant les outils que ces sites doivent utiliser… « La bataille juridique et judiciaire n’est pas finie » prévient Laurence Rossignol
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