En 40 ans, l’Association Française du Corps Arbitral Multisports n’avait jamais nommé de femme à sa tête. C’est désormais chose faite avec Charlotte Girard Fabre. Une nomination qui ouvre de nouvelles perspectives pour le monde encore masculin de l’arbitrage, puisque cette dernière n’a jamais caché son engagement pour la parité et la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
Un nouveau plafond de verre brisé dans le monde du sport. L’Association Française du Corps Arbitral Multisports (AFCAM) a nommé sa première présidente en 40 ans d’existence. C’est Charlotte Girard Fabre, actuelle présidente de l’APES (Accord Partiel Elargie pour le Sport) du Conseil de l’Europe, arbitre de haut niveau dans le handball et anciennement dans le hockey sur glace, qui a été choisie par 94 % des votants.
Les postes de direction du milieu sportif en voie de féminisation
L’arbitre, c’est celui ou celle que l’on remarque peu, voire pas du tout, pendant un match. Cette fonction est restée l’angle mort de la lutte pour la parité dans le sport… mais les choses commencent à changer. En France, seul pays qui parvient à comptabiliser son nombre exact d’arbitres, l’AFCAM évalue 30,5% de femmes arbitres, soit 72 654 pour 165 171 hommes. Pour le sport de haut niveau, cette proportion descend à 21,3%.
En nommant une femme à la présidence de l’AFCAM, le monde de l’arbitrage rompt-il avec une vision masculine du sport pour aller vers davantage d’égalité ? Suite à sa nomination, Charlotte Girard Fabre salue les actions menées par son prédécesseur Patrick Vajda : « Patrick, tu as toujours affirmé que « la femme était l’avenir de l’arbitrage ». Aujourd’hui, en devenant la première femme présidente de l’AFCAM, je me permets de te donner raison une fois encore. Tu as œuvré dès le début pour la féminisation de notre corps arbitral. Il y a 35 ans déjà, avec Michel [Dailly], tu lançais le premier séminaire dédié à l’arbitrage au féminin, une initiative visionnaire. Plus tard, vous avez exigé des fédérations qu’elles nomment des déléguées féminines. Et même si le combat pour l’égalité n’est pas terminé, nous sommes aujourd’hui à un tournant : notre comité exécutif est désormais totalement paritaire. »
Une présidente engagée contre les violences sexistes et sexuelles
Son expérience d’arbitre sur six championnats du monde et deux Jeux Olympiques confère à Charlotte Girard Fabre toute la légitimité nécessaire pour occuper cette nouvelle fonction au sein de l’AFCAM. Pourtant, faire partie du top 4 mondial n’a pas toujours protégé la nouvelle présidente, notamment lorsqu’elle a dénoncé les violences sexistes et sexuelles dont elle a été victime. « J’ai été victime d’agression sexuelle sur la glace en tant qu’arbitre par un joueur. Et mon collègue arbitre a dit ‘c’est juste une main aux fesses, ça va bien se passer’ et il ne l’a jamais sanctionné. À l’époque, je ne savais pas vers qui me tourner. J’ai subi plus de dix ans de discriminations simplement parce que je suis une femme », confiait-elle en avril 2023 lors des Assises internationales de lutte contre les violences sexuelles dans le sport.
Elle poursuit : « L’arbitrage c’est très paradoxal. Vous êtes un bon arbitre quand on ne vous voit pas. Quand j’ai dénoncé des faits d’agressions sexuelles et sexistes et des faits de discriminations, on m’a coupé la tête. (…) Qui dit dénoncer quelque chose en tant qu’arbitre, dit perdre la prochaine désignation. (…) J’avais beau avoir le plus gros palmarès de l’arbitrage français du hockey sur glace, le jour où j’ai dénoncé, en pensant avoir un totem d’immunité puisque je suis top 4 mondial : plus de licence nationale, plus de licence internationale. »
Si le manque de données sur l’arbitrage à l’international ne permet pas d’estimer une baisse des violences sexistes et sexuelles grâce à l’augmentation des arbitres femmes présentes sur le terrain, la nomination de Charlotte Girard Fabre envoie déjà un signal fort, celui de la fin de l’omerta.
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