
Pixabay2.0
Une étude pointe les différences de comportements entre femmes et hommes au travail. Mais donne des recommandations limitées.
Des chercheur.ses de l’Université d’Harvard et de l’Université d’Etat de l’Ohio ont voulu analyser le stress lié au temps et proposer des solutions contre « une épidémie sociétale qui compromet la productivité, la santé physique et le bien-être émotionnel ». Et, d’entrée de jeu l’étude voit d’énormes différences entre femmes et hommes.
Quand il est question de demander de repousser une « deadline», cela ne semble poser aucun problème aux hommes tandis que les femmes y renoncent souvent. Pourquoi ? Première explication : « les femmes craignent davantage d’alourdir le travail des autres, et ont peur d’être pénalisées et d’être vues comme moins compétentes » observe l’étude qui a analysé 9 expériences auprès de 5738 Etats-Uniens. Et ceci même si rien ne prouve ou ne laisse prédire qu’elles seront jugées plus sévèrement que les hommes si elles demandent un délai supplémentaire.
Le professeur de marketing et co-auteur de l’étude, Grant E. Donnelly, a mené une expérience révélatrice dans l’une de ses classes : il a demandé à 103 étudiants de lui rendre un travail et tous les étudiants ont été informés qu’ils pouvaient demander une prolongation de la deadline sans être pénalisés. Les garçons ont été deux fois plus nombreux à demander un délai que les filles (36% contre 15 %)
Autre explication : les femmes ont généralement plus de choses à faire. Les expert.es rappellent que beaucoup de femmes s’occupent toujours davantage de la vie domestique et des enfants que les hommes. Et, au travail également, elles ont tendance à accumuler les tâches même en dehors de leurs responsabilités formellement définies. Plus altruistes, elles ont, semble-t-il, plus de mal à déléguer et à dire non quand on leur demande de faire quelque chose.
Pour Grant E. Donnelly, les femmes se tirent « une balle dans le pied » et la recommandation à tirer de cette étude est de mettre en place des politiques formelles et des dispositifs permettant à tout un chacun de pouvoir demander un délai…
Changer dans les têtes
Pas sûr que cela suffise. Ça n’a manifestement pas suffi dans l’expérience menée avec les étudiant.es. Comme le dit une autre co-auteure de l’étude, la professeure adjointe d’administration des affaires à l’Université de Harvard, Ashley V. Whillans, le mal est plus profond : « les femmes ont intériorisé cette conviction qu’elles doivent aller au-delà de leurs collègues masculins ».
Et de nombreuses études montrent que cette conviction se construit et s’alimente tout au long de la vie. Dès la naissance, les filles sont conditionnées pour intérioriser l’idée que leur parole, leurs demandes, ont moins d’importance que celles des hommes. Une étude sur les pleurs des bébés montre que les cris des bébés filles sont interprétés comme des caprices auxquels il ne faut pas répondre, tandis que ceux des garçons sont perçus comme des demandes qu’il faut comprendre et satisfaire. A l’école, les enseignants, inconsciemment, donnent davantage la parole aux garçons. Dans les médias, les hommes s’expriment quatre fois plus que les femmes… Le double standard de jugement est permanent. La colère n’est pas interprétée de la même façon : un homme en colère est perçu comme ayant du caractère, une femme en colère est perçue comme une hystérique, et ce ne sont que quelques exemples… Tout ça n’incite pas les femmes à taper du poing sur la table ! (lire : POURQUOI LES FEMMES DOIVENT SE METTRE EN COLÈRE)
Si les auteur.es de l’étude ont raison de dire qu’il faut installer des protocoles et dispositifs permettant de demander des délais, il faut aussi changer ce que l’on met dans les têtes des hommes et des femmes et qui inhibe les femmes.
———————————————————–Annonce—————————————————- Comment BOOSTER LES CARRIERES DES FEMMES ?
|