Le nombre de victimes de violences conjugales est en perpétuelle augmentation. Selon le dernier rapport du ministère de l’Intérieur, la majorité des victimes sont des femmes, quand les agresseurs sont presque toujours des hommes.
« La persistance de la violence faite aux femmes n’est pas une fatalité (…), nous devons y mettre fin et nous allons le faire », s’était engagé le président de la République Emmanuel Macron le 25 novembre 2023 à l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Un an plus tard, le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) publie un rapport évaluant le nombre de victimes de violences conjugales sur l’année 2023 : 271 000, soit 10% de plus qu’en 2022.
Des violences systémiques
Le spectre des violences conjugales est large. Sur les 271 000 victimes enregistrées, 64% ont subi des violences physiques (homicides et violences sans incapacité), 31% des violences verbales ou psychologiques (harcèlement moral, menaces, atteintes à la vie privée, diffamations et injures) et 4% sont des violences sexuelles (viols, tentatives de viols et agressions sexuelles).
Le rapport du SSMSI lève également le voile sur l’aspect genré et systémique de ces violences : 85% des victimes enregistrées sont des femmes. Cette proportion tend à varier en fonction du type de violences. Lorsqu’il s’agit de violences sexuelles, les femmes sont concernées à 97 %, 86% pour les violences psychologiques et 84 % pour les violences physiques. Du côté des agresseurs, les proportions s’inversent : 86% des personnes mises en cause sont des hommes.
Une libération de la parole et de l’écoute
Le nombre de victimes suit une augmentation constante, reflet d’une libération progressive de la parole. En 2022, le chiffre avait déjà connu une hausse de 15% sur un an. L’évolution de MeToo au sein des différentes sphères de la société permettant de faire basculer la honte, non plus du côté des victimes, mais des agresseurs. « Dans un contexte de libération de la parole et d’amélioration des conditions d’accueil des victimes par les services de police et de gendarmerie, le nombre de victimes enregistrées a ainsi doublé depuis 2016 », observe le SSMSI.
Mais la libération de la parole doit être accompagnée d’une libération de l’écoute. Cela passe notamment par une amélioration de la prise en charge des victimes et des stratégies de lutte contre les violences faites aux femmes. Au fil des années, « le champ des atteintes pour lesquelles le caractère conjugal de l’infraction constituait une circonstance aggravante » s’est élargi. L’aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales en est un exemple. Le 7 novembre dernier, la secrétaire d’État à l’Égalité entre les femmes et les hommes Salima Saa a déclaré que cette aide de 869 euros, versée par les caisses d’allocations familiales et les caisses de la MSA (Mutualité sociale agricole), avait été attribuée à 26 525 personnes depuis son entrée en vigueur en décembre 2023. Attribuée sous trois à cinq jours, elle vise à aider une victime à quitter le domicile et à faire face à ses dépenses immédiates.
Moins de 2 victimes sur 10 portent plaintes
Mais des freins obstruent encore la libération de la parole des victimes. Elles sont encore nombreuses à ne pas déposer plainte. En 2019, selon le rapport « Cadre de vie et sécurité » du ministère de l’Intérieur, sur les 213.000 femmes victimes de violences physiques ou sexuelles commises par leur conjoint ou ex-conjoint, seules 18% déposaient plainte.
Partie immergée de l’iceberg, la part des victimes enregistrées par les services de sécurité reste minoritaire face à l’ampleur des violences faites aux femmes. Le rapport insiste : « Les victimes de violences conjugales enregistrées par les services de sécurité ne représentent qu’une partie des personnes ayant subi ce type de violence chaque année, ces faits pouvant n’être jamais signalés ou l’être plus tardivement ».
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