Après une succession de directeurs atteints par différentes affaires de sexisme, l’institution aurait pu choisir une femme… encore raté !
Les crises de gouvernance s’enchaînent à Sciences Po Paris, mais à la fin, c’est toujours un homme qui gagne. Depuis mars dernier, l’école qui forme les élites, cherchait un successeur à Mathias Vicherat, renvoyé devant la justice dans un dossier de violences conjugales.
Lui-même succédait à Frédéric Mion, contraint de démissionner en février 2021. Il avait dissimulé des faits d’inceste concernant Olivier Duhamel, dont il avait connaissance depuis 2018. Olivier Duhamel était président de la Fédération nationale des Sciences politiques (FNSP) qui chapeaute l’école. Il présidait aussi Le Siècle, club d’élites qui compte bon nombre de responsables et enseignants de Sciences Po.
Frédéric Mion avait lui-même succédé à Richard Descoings, mort en 2012 dans une chambre d’hôtel à New York dans des circonstances mystérieuses qui ont donné lieu à de multiples interprétations.
Un enarque de la promotion Senghor
Difficile, après une telle histoire, de trouver la bonne personne pour diriger une école. Le challenge était d’autant plus compliqué que Sciences Po est secouée aussi par d’autres crises avec notamment des mobilisations d’étudiants propalestiniens qui ont donné lieu à des accusations d’antisémitisme.
Malgré tout, les candidat.es étaient au rendez-vous et il y avait une femme parmi les trois finalistes. Mais le conseil d’administration de la Fondation nationale des sciences politiques, qui chapeaute Sciences Po, a fait son choix, conforme à celui du conseil de l’Institut, organe de gouvernance interne à l’établissement.
Et c’est un homme qui dirigera la prestigieuse école : Luis Vassy, 44 ans, diplomate, diplômé de l’ENA, promotion Senghor, la même qu’Emmanuel Macron. Après avoir été ambassadeur de France aux Pays-Bas, il a dirigé le cabinet des ministres des Affaires étrangères Catherine Colonna puis Stéphane Séjourné.
Arancha Gonzalez la finaliste qui avait toutes les qualités
Une femme pourtant avait toutes les compétences pour prendre la direction de Sciences Po : Arancha Gonzalez, 55 ans, ancienne ministre espagnole des affaires étrangères a une expérience universitaire que Luis Vassy n’a pas. Elle dirige l’école des affaires internationales de Sciences Po. Elle a été directrice de cabinet de Pascal Lamy, directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) entre 2005 et 2013. Puis directrice exécutive du Centre du commerce international, l’agence conjointe de l’Organisation des Nations Unies et de l’Organisation mondiale du commerce.
En 2019, elle a participé, avec 27 autres femmes responsables politiques et leaders d’opinion au livre intitulé Women Shaping Global Economic Governance pour mieux façonner les économies dans le contexte des révolutions numériques. « Il y a une petite différence, je suis une femme » avait-elle déclaré dans Le Monde qui consacrait un article à cette longue quête de directeur pour Sciences Po… Une petite différence qui est donc un sérieux désavantage.
Nous avons volontairement évité de donner le nom du nouveau directeur dans le titre de notre article. Nous avons réservé à ce nouveau directeur le sort qui est souvent réservé aux femmes lorsqu’elles accèdent à des fonctions prestigieuses. Lire : « Une femme », l’exception qui confirme la règle « sans femme »