La riposte d’un Marseillais aux terroristes de Daesh a fait sensation. Mais ne change rien au problème de la survalorisation de la violence.
Sur la Toile, un Marseillais, Mohamed Henni, auteur de vidéos, a suscité une forme de rire approbateur. En réponse aux terroristes de Daesh qui annonçaient vouloir frapper prochainement la cité phocéenne, il a crânement dit ce qu’il pensait des terroristes et fait savoir que les Marseillais les attendaient de pied ferme.
Et pour donner du poids à ses propos, chaque phrase de sa vidéo est entrecoupée d’insultes. Insulte, mot féminin. Avec un vocabulaire autrement choisi, l’homme parle de relations sexuelles avec la mère de son adversaire. Voire avec sa grand-mère. Il lui signifie que la génitrice (voire la mère de la génitrice) du terroriste s’adonne à la prostitution. Que le terroriste lui-même partage cette activité. Il traite non pas de « salaud » mais de « salope » ledit adversaire et lui annonce crûment qu’il envisage de le sodomiser. Le tout sur une durée de 7,30 minutes alternant propos sur la psychologie des terroristes, menaces et injures. Une vidéo vue plus de 1,5 million de fois.
Que pèsent toutes les réflexions des experts sur les aspects religieux, sociaux, économiques ou psychologiques du terrorisme face à un tel concours de zizi ?
Dans le discours du Marseillais, tout ce qui est belliqueux et viril semble digne d’intérêt, tout ce qui est féminin est méprisable et doit souffrir. Masculin = bien, féminin = pas bien. C’est dans toutes les têtes. Souvenons-nous juste de l’expérience « courir comme une fille »… Tout le monde avait dans la tête que c’était ridicule…
Ce n’est pas en flattant le narcissisme des hommes violents qu’on arrêtera le terrorisme. Le psychanalyste tunisien Fethi Benslama a eu raison d’appeler les médias à ne pas publier les noms et photos des auteurs d’actes terroristes pour ne pas en faire des modèles identificatoires pour d’autres jeunes potentiels candidats à la Star Ac du terrorisme.
Mais ça ne suffira pas, c’est aussi notre imaginaire collectif sublimant la virilité violente qu’il faut revoir. Cela suppose un travail en profondeur sur notre univers culturel allant des jeux vidéos au cinéma en passant par la musique, l’Histoire ou la féminisation des mots honorables. (Chahla Chafiq abordait ce sujet ici au lendemain de l’attentat de Charlie.)
Déclarer la guerre aux terroristes à grand renfort de démonstration de force physique et d’armes est une chose mais déclarer la guerre aux représentations serait plus efficace mais aussi plus complexe. Très vaste programme !