Un huitième de la population mondiale, un quart en Afrique, souffre de la faim, selon les dernières estimations de la FAO. En 20 ans les progrès sont sensibles, mais la croissance ne bénéficie pas forcément à ceux qui ont faim.
« La lutte contre la faim menée ces vingt dernières années a donné de meilleurs résultats que ce que l’on pensait ». Le premier message de l’Organisation mondiale de l’alimentation (FAO), dans son rapport sur « l’état de l’insécurité alimentaire dans le monde » publié le 1er octobre, est positif.
Le nombre total de personnes sous-alimentées a baissé de 132 millions entre 19992 et 2012, passant de 18,6 à 12,5% de la population mondiale – et de 23,2 à 14,9% dans les pays en développement.
Si le constat est meilleur qu’attendu, la situation n’en reste pas moins « à un niveau inacceptable et l’éradication de la faim demeure un enjeu mondial majeur. » En 2012, « la sous-alimentation chronique touche encore un nombre inacceptable de personnes » : près de 870 millions de personnes dans le monde, soit un être humain sur huit, selon les estimations de la FAO. L’ONG Oxfam considère pour sa part que les progrès sont « d’une lenteur alarmante ».
En 1990, les Objectifs du Millénaire pour le développement entendaient diviser par deux, d’ici à 2015, le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation chronique. Pour la FAO, atteindre cet objectif est encore possible, mais à condition d’y mettre les moyens. Car les progrès mondiaux, meilleurs que prévu jusqu’en 2007, se sont ensuite « ralentis puis stabilisés ». Et « l’Afrique continue à s’écarter considérablement et de plus en plus de la voie qu’elle devrait emprunter pour atteindre sa cible ». Sur le continent, près d’une personne sur 4 souffre de la faim.
La croissance et ses enjeux
Pour la FAO, face à ce défi « la croissance économique est nécessaire mais elle n’est pas suffisante pour accélérer la réduction de la faim et de la malnutrition ». Pour qu’elle se traduise par une amélioration de la nutrition des plus démunis, « il faut que les pauvres soient parties prenantes au processus de croissance et qu’ils en bénéficient ».
Quant à la croissance agricole, le message est connu et ici répété : il faut donner davantage d’autonomie aux femmes. « Les recherches montrent que davantage d’argent est consacré aux dépenses qui améliorent la nutrition et la santé quand les femmes exercent un plus grand contrôle sur le revenu familial », souligne la FAO.
Si les réflexions sur l’avenir des objectifs pour le développement de l’après-2015 accordent une part conséquente au rôle des femmes, la question des inégalités qui accompagnent la croissance reste dans l’ombre (Voir : La fin de l’extrême pauvreté en 2030 ?).
L’enjeu de la nutrition
La croissance de la productivité agricole doit aussi être « sensible à la nutrition », souligne le rapport. afin de réduire les différentes formes de malnutrition. « La réduction de la faim ne se limite pas simplement à une augmentation de la quantité de nourriture, il s’agit également d’améliorer la qualité des aliments en termes de diversité, d’éléments nutritifs et de salubrité. »
C’est, au fond, un système de pensée qui doit changer, comme le soulignait récemment Danielle Nierenberg, co-fondatrice de Food Tank. « La plupart des recherches et des investissements dans l’agriculture se concentrent sur les féculents. Au lieu de s’intéresser aux cultures riches en nutriments, ou de protéger les ressources en eau, fertiliser les sols, ou encore de promouvoir l’égalité des sexes ou encourager la jeunesse. »