Si le milieu sportif s‘ouvre petit à petit aux femmes, la gouvernance du sport reste la chasse gardée des hommes. « Carton rouge » siffle le Haut Conseil à l’Égalité qui préconise quarante mesures pour en finir avec les obstacles structurels et institutionnels à la parité.

Les Jeux Olympiques de Paris 2024 étaient les premiers jeux paritaires de l’histoire du côté des athlètes. Le 20 mars dernier, Kirsty Coventry est devenue la première femme à présider le Comité International Olympique (CIO). En décembre 2024, Charlotte Girard Fabre a brisé un nouveau plafond de verre dans le milieu de l’arbitrage en étant la première femme nommée à la tête de l’Association Française du Corps Arbitral Multisports. Si la féminisation du milieu sportif semble être en bonne voie, un rapport du Haut Conseil à l’Égalité, publié le 16 avril 2025, expose les obstacles à une parité réelle, notamment dans la gouvernance du sport. Résultat : « Carton rouge » pour la France.
Le plafond de verre persiste
Déjà lors des Jeux de Paris 2024, l’absence totale de parité parmi les entraîneurs et entraîneuses avait indigné. Seulement 13% de femmes coaches, soit le même pourcentage qu’aux JOP de 2021 à Tokyo. Au niveau européen, c’est à peine mieux : 23 %, comme l’indique un rapport de la commission et du Conseil de l’Europe cité par le HCE. (Pour en savoir plus, lire : « Match nul pour les JO et la parité« )
Le rapport du HCE lève le voile sur un système qui tend à écarter les femmes des fonctions décisionnaires. En France, seulement 34 % des dirigeant.e.s de structures sportives sont des femmes et 33 % pour les encadrant.e.s, un chiffre en baisse, note le rapport. En 2025, à la suite des élections fédérales de 2024, seulement 3 des 39 fédérations olympiques et paralympiques sont présidées par des femmes. À l’inverse, lorsqu’il n’y a plus d’enjeux de pouvoir et de prestige, les femmes sont mieux représentées. Parmi les bénévoles, elles sont 46%. L’implication dans le milieu sportif rime encore avec précarité pour une majorité de femmes.
Le HCE identifie différents obstacles à la parité : contrôle du corps féminin, valorisation d’un idéal de virilité, manque de modèles féminins dans les rôles de leadership, des difficultés de reconversion pour les sportives de haut niveau, des conditions de travail souvent précaires en particulier pour les femmes ainsi que les critères de sélection des concours. Au sein des formations STAPS, les femmes représentent 32% des étudiant.es. L’écart se creuse davantage selon les filières, comme l’entraînement sportif où elles constituent à peine 20 % des étudiant.e.s. « En 2025, seulement 3 femmes président l’une des 39 fédérations sportives olympiques et paralympiques. Ce chiffre est le symbole d’un monde du sport qui ne laisse pas de place aux femmes. Ces 40 recommandations doivent permettre au Gouvernement et aux élu.es de changer le quotidien et l’avenir des femmes dans le sport. », estime Bérangère Couillard, présidente du Haut Conseil à l’Egalité.
40 mesures pour la parité
Le combat pour la parité dans le milieu sportif n’est pas nouveau. Depuis la loi « pour l’égalité réelle des femmes et des hommes » ,déposée par Najat Vallaud-Belkacem en 2014, l’instauration de quotas a permis de faire augmenter la part de femmes au sein des fédérations sportives. À cela s’ajoute la loi sur la parité dans les instances dirigeantes sportives, portée par l’ancienne ministre des sports Roxana Maracineanu, adoptée en 2022 et effective depuis le 1er janvier 2024. Mais l’absence de parité persiste. « Qu’il soit nécessaire de mettre des dispositifs législatifs en dit long sur le sexisme dans le milieu sportif. Il n’est pas possible de changer tous les comportements avec des lois. », regrettait la sociologue du sport Béatrice Barbusse lors d’une interview accordée aux Nouvelles News en avril 2024 à l’occasion de la parution de son essai « Dirigeantes sportives et plafond de verre. Une histoire inachevée » (Éditions Les Sportives).
Dans son rapport, le Haut Conseil à l’Égalité préconise quarante mesures pour déboulonner les dernières résistances à l’application d’une véritable parité dans le milieu sportif. Parmi ces propositions : une nécessaire instauration de « co-présidences mixtes » au sein des fédérations. Inspiré par le programme baptisé « club des 300 dirigeantes », lancé par le comité olympique français en 2021, le HCE préconise également la création d’un programme pour accompagner les femmes déjà impliquées dans le mouvement sportif.
À cela s’ajoute la création d’un « programme d’accompagnement des jeunes filles », piloté par le ministère des Sports, afin de faire progresser la féminisation des formations sportives. L’objectif ? 40% de candidatures féminines pour l’entrée en licence STAPS d’ici 2026. « Dès l’enfance, les pratiques sportives sont souvent différenciées en fonction du sexe, influençant durablement la place des filles et des garçons dans le monde du sport », note le rapport. Si les biais genrés et sexistes restent ancrés dans le milieu sportif, les mesures prévues par le HCE décident de prendre le mal à la racine.
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